« Un bureau, c’est quand même pas l’usine ! alors pourquoi s’inquiéter du bruit dans les bureaux ? » Cette phrase est malheureusement encore trop significative d’un déni de conscience. Et cette façon d’argumenter est classique, soit se référer à une situation plus grave pour laisser entendre qu’on ne risque rien dans notre propre cas.
Cependant les effets néfastes sont bien présents dans les bureaux mais ce ne sont pas les mêmes que sur les autres lieux de travail où cela parait évident. Nous ne sommes pas les seuls à le dire. Si vous n’êtes pas un fervent lecteur, vous pouvez regarder ces deux vidéos qui font partis des sources qui nous ont servies pour la rédaction de cet article, soit celle de l’Institut National de Recherche et Sécurité (INRS) ou celle de l’Association de Santé et Médecine au Travail (ASMT) avec Frédéric Courant (oui, le Fred de C’est Pas Sorcier).
Toutefois, si vous ne pouvez pas rajouter de son au bruit ambiant, alors nous vous proposons de comprendre le bruit, comment il fonctionne et comment s’en préserver.
Le son est une vibration mécanique d’un fluide comme l’air ou l’eau. Quand nous nous parlons, nous faisons vibrer l’air devant notre bouche. Cette vibration arrive jusqu’aux oreilles de notre interlocuteur faisant ainsi vibrer ses tympans. Attention, le son n’est constitué d’onde électromagnétique. Il s’agit bien de vibration de l’air, oubliez donc le son de l’explosion de l’Étoile Noire dans « Star Wars » puisqu’il n’y a pas d’air dans l’espace, donc pas de son !
À quel moment un son devient-il un bruit ?
C’est une très bonne question à laquelle beaucoup réponde « à partir du moment où ça nous casse les oreilles ! » Mais alors, un concert d’ACDC, est-ce du son ou du bruit ? Car oui, si vous êtes collés aux enceintes, vos oreilles vont sans doute apprécier mais pas vos tympans. A contrario, un robinet mal fermé avec son plouc-plouc incessant ne vous rendra pas sourd sinon totalement fou, surtout au moment de s’endormir.
Bref, c’est ce dernier exemple qui nous rapproche de la définition que nous cherchons :
Un son devient un bruit quand celui-ci devient gênant.
Attention toutefois avec cette caractérisation : un son n’a pas besoin d’être gênant pour être néfaste. Soyez vigilants avec ACDC ou tout autre musique à fond dans votre casque Bluetooth.
Pour résumé, retenons que le bruit est une propagation de vibration dans l’air et qu’il n’a pas besoin d’être puissant pour être gênant (plouc, plouc, plouc, …) voire très gênant.
Les 4 facteurs du bruit
Entrons un peu plus dans le cœur du sujet.
En fait, il existe bien plus que 4 facteurs du bruit comme la fréquence, la sensibilité individuelle, le caractère intempestif ou continu, … Cependant, nous pencherons sur les 4 principaux, ceux qui vont nous permettre de bien appréhender le sujet qui nous concerne.
L'intensité :
Elle se mesure en décibel A soit dB(A). Plus il y a de décibel, plus le son est fort. Cependant, nous ne sommes pas sur une échelle linéaire sinon logarithmique. Sans se perdre dans les détails techniques, si vous être face à trois machines de même intensité sonore et que vous en stopper une, le nombre de décibel ne diminuera pas d’un tiers mais seulement de 2 décibels. Oui, ce n’est pas évident à comprendre, retenons principalement que diminuer le bruit dans un environnement complexe n’est pas aussi simple que de baisser le son de votre téléviseur.
l'environnement :
Avez-vous remarqué que le bruit semblait plus feutré dans un paysage fraîchement enneiger. Ok, avec le réchauffement climatique, il est difficile pour certains d’avoir un vécu récent de cet exemple. Prenons un bruit en extérieur et le même bruit dans un hangar en béton. L’exemple est déjà plus parlant. Peut-être êtes-vous aller dans une réception en extérieur et une autre en intérieur ? Dans quelle situation avez-vous été le plus gêné par le brouhaha ambiant.
En extérieur, les vibrations de l’air vont se propager, un point c’est tout. Dans un hangar, une pièce ou un open-space, les vibrations vont rebondir sur tous les murs et produire un effet de résonnance désagréable.
La distance :
Un avion au décollage, c’est 130 dB(A) à 100m, soit supérieur au seuil de douleur, mettez-vous à 800m et vous pourrez regarder des avions décoller toute la journée. Plus vous vous éloignez de la source du bruit, plus les vibrations de l’air vont se disperser jusqu’à disparaître comme le font les « ronds » dans l’eau après avoir jeté un caillou au milieu d’un lac.
La durée d'exposition :
Plouc, plouc, plouc, … C’est le facteur le plus pervers, celui qu’on oublie plus ou moins volontairement et qui nous fait dire : « ben, y a pas de danger ».
Dans un bureau, l’intensité n’est pas forcément très élevée mais elle est continuelle. C’est le principe du harcèlement. Tentez une simple expérience. Prenez un stylo le plus basique qui soit. Faites-le chuter de 1 ou 2 centimètres sur le dos de votre main. Ça fait mal ? Non. Cependant, répétez l’opération pendant 5 minutes, vous n’y tiendrez pas.
En ce qui concerne le bruit dans les bureaux, c’est la même chose. Nul besoin qu’il soit puissant pour être néfaste. Vous y restez jusqu’à 8 heures par jour et 5 jours par semaine.
L'échelle du bruit
Voici une échelle du bruit (ou échelle de décibel) que nous proposons comme il en existe tant d’autre. Toutefois, nous vous invitons à la consulter après avoir lu la partie sur les 4 facteurs du bruit pour une lecture plus avisée. Les valeurs exprimées sont en dB(A). Sans entrée dans les détails techniques, le (A) signifie que les valeurs ont été pondérées en fonction des capacités physiques de l’oreille humaine. Les sons de trop basses ou de trop hautes fréquences ne sont pas pris en compte puisque nos tympans y sont complètement insensibles.
On notera 4 paliers dans ce schéma :
Jusqu’à 40 dB(A) : ça n’a rien de scientifique mais appelons-la la zone ZEN. Jusque-là, tout va bien.
A partir de 40 db(A) la nuit et 55 dB(A) le jour, les premiers effets néfastes se font ressentir comme le stress, la fatigue, des troubles du sommeil, … entrainant des conséquences sur notre santé.
A partir de 80 dB(A), commence le seuil des risques pour l’audition pour des expositions à long terme comme la surdité. Malheureusement, ces problèmes sont irréversibles. Sur le moment, ce niveau de bruit va créer des troubles de l’attention et masquer d’autres bruit d’alerte et sera source d’accident du travail. A partir de 85 dB(A), la règlementation impose le port de protections auditives.
A partir de 105 dB(A), les risques pour l’audition sont à court terme voire à très court pour certains.
A partir de 120 dB(A), c’est ce qu’on appelle le seuil de la douleur, un signal d’alarme que nous envoie notre corps mais qui arrive hélas bien trop tard !
Les effets néfastes du bruit dans les bureaux
Où se situe mon bureau dans cette échelle ?
Si vous en êtes arrivé à ce niveau de lecture, vous savez déjà que nous ne vous donnerons pas une mesure précise de votre lieu de travail. Vous pouvez le faire vous-même avec une application sonomètre de votre smartphone mais attention celui-ci ne vous donnera pas une mesure précise sinon une vague idée. Toutefois, si vous êtes soucieux du bien-être dans votre entreprise, vous pouvez investir dans un sonomètre. Inutile d’aller dans le haut de gamme, un modèle entre 30 et 40 € sera parfait.
Dessinez un plan de votre entreprise et faites plusieurs mesures dans tous les espaces de votre entreprise mais aussi dans plusieurs endroits d’une même pièce.
Les résultats pourraient vous surprendre selon les lieux et les moments. Ils vous mettront certainement dans le deuxième palier et pourraient parfois se rapprocher de sa partie haute. Ne les sous-estimez pas.
Des effets qui ne se voient pas forcément au premier coup d’œil
Entre 50 et 80 dB(A), la fourchette est très large, cependant le 4ème facteur que nous avons cité plus prend toute sa valeur. Certes, le bruit n’est pas fort, il est juste tout le temps.
Sa première conséquence sera un effort de centration continuel qui amènera fatigue, stress et anxiété. Ses effets viendront petit à petit, vous n’arrivez plus à vous reposer et vous ne soupçonnez pas pourquoi.
S’en suit une gène dans la concentration, des détournements de l’attention, une irritabilité augmentée et donc des problèmes de communication qui viennent se rajouter. La conséquence sera une baisse de la productivité qui sera bien sûr source de stress et d’anxiété.
Sur le très long terme, ce sont bien les troubles du sommeil et les troubles cardiovasculaires qui peuvent en résulter.
Vous pensez sans doute qu’on exagère. Prenez bien le temps de répondre à cette question, en vous y penchant dessus, sur plusieurs jours s’il le faut, ça peut valoir le coup : Combien d’arrêt maladie dans votre entreprise ont pour conséquence directe ou indirecte des problèmes de bien-être au travail ?
Et les accidents du travail :
Car oui, une chute dans l’escalier, une cheville tordue en marchant simplement dans un couloir sont souvent dû à des erreurs d’inattention. La victime se plaindra souvent en disant : « ah ! je me suis blessée bêtement ! ». Ça veut bien dire ce que ça veut dire.
Réduire le bruit au bureau
Fini la partie catastrophe car le bruit et ses conséquences ne sont pas une fatalité. Pour réduire le bruit dans vos locaux, il suffit de s’attaquer à ses différents facteurs.
Le troisième et quatrième facteur va concerner principalement votre organisation. Il s’agit d’éloigner le personnel des lieux les plus bruyants ou de l’exposer le moins possible. Cela peut se faire soit par une rotation dans les postes de travail soit par du télétravail mais c’est loin d’être facile voire impossible dans certains cas à mettre en place.
Penchons-nous plutôt sur les 2 premiers facteurs car des solutions efficaces et faisables pour tous existent.
Réduire le bruit par isolation
On s’attaque au premier facteur soit l’intensité. Le principe est de mettre un obstacle entre la source bruyante et l’opérateur qui va bloquer les vibrations sonores ou du moins les diminuer fortement. Il est important de bien identifier les sources sonores afin de trouver la ou les solutions les plus adaptées. Le photocopieur sera entouré de cloisons phoniques, les postes de travail en open-space seront séparés par des cloisonnettes, les personnes au téléphone s’isoleront dans des cabines acoustiques.
Réduire le bruit par absorption
Capitonner son environnement est une solution plus efficace qu’il n’y parait. Les vibrations d’un son qui vont rebondir sur plusieurs parois et mobiliers parviendront plusieurs fois à vos oreilles avec plus ou moins de latence et donc de résonance. Imaginez alors plusieurs sources de bruit dont les vibrations rebondissent encore et encore. Bonjour l’aspirine d’accord, d’accord. Avec la pose de simples matériaux comme le P.E.T sur différents murs bien choisis, vous allez absorber les vibrations et empêcher qu’elles ne repartent une deuxième fois si ce n’est plus jusqu’à vos tympans. Ce sont des solutions qui fonctionnent très bien dans de grands espaces.
En conclusion,
Pas besoin d’être un super ingénieur pour combattre les effets néfastes du bruit dans les bureaux. En sachant ce qu’est un son, en connaissant les 4 facteurs principaux du bruit et en sachant lire une échelle des décibels, vous avez le savoir nécessaire avec la prise de conscience qui l’accompagne pour comprendre le bruit et vous pencher sur ce problème.
Vous l’avez compris, c’est une question de bien-être au travail mais aussi une question de productivité et d’efficacité au sein de l’entreprise avec une réduction sensible des arrêt maladie.
Heureusement, des méthodes ont été pensées pour que chacun puisse œuvrer et rester concentrer à sa tâche. Dans un prochain article, nous vous présentons les différentes solutions techniques adaptées aux bureaux comme celui-ci sur les cabines acoustiques.
Pour aller loin, vous pouvez consulter les sources qui nous ont aidées pour la rédaction de cet article :